Peter Altmaier, ministre de l'Économie allemand et Bruno Le Maire, ministre de l'Économie français ont lancé ce jeudi une initiative franco-allemande "pour une infrastructure européenne de données". Il s'agit de la création d'un écosystème de Cloud computing qui vise à réduire la dépendance de l'Europe à l'égard des géants de la Silicon Valley, Amazon, Microsoft et Google. La France et l'Allemagne veulent s'allier face à la migration des infrastructures informatiques de leurs institutions et entreprises vers les plateformes dites de "cloud" (informatique dématérialisée), dominées aujourd'hui par de grands acteurs américains comme Amazon Web Services (AWS), Microsoft (Azure) ou Google.
Ce projet baptisé Gaia-X vise à faire en sorte que les données des entreprises et institutions européennes soient hébergées en Europe, d'offrir la possibilité de changer facilement de prestataire et surtout d'échapper au "Cloud Act" américain. Rappelons que les États-Unis ont adopté en 2018 une loi extraterritoriale, baptisée Cloud Act (pour « Clarifying Lawful Overseas Use of Data Act »). Elle confère aux autorités américaines, dans le cadre d'une enquête pénale, le droit d'exiger des entreprises le transfert de données vers les États-Unis lorsque celles-ci sont stockées à l'étranger.
Pour donner aux entreprises européennes la possibilité de stocker plus facilement leurs données sur le territoire, sans craindre leurs transferts à l'étranger, Gaia-X vise donc à fédérer et faire émerger des services européens. Gaia-X établira des normes communes pour le stockage et le traitement des données sur des serveurs situés localement et conformes aux lois strictes de l'Union européenne sur la confidentialité des données. Peter Altmaier, s'exprimant à Berlin, a décrit Gaia-X comme un « tir de lune » qui aiderait à réaffirmer la souveraineté technologique de l'Europe, et a invité d'autres pays et entreprises à se joindre au projet.
« Nous ne sommes pas la Chine, nous ne sommes pas les États-Unis, nous sommes des pays européens avec nos propres valeurs et avec notre propre intérêt économique que nous voulons défendre », a déclaré son homologue français Bruno Le Maire à Paris lors d'une conférence de presse. Cette initiative intervient alors que la France et l'Allemagne intensifient leur coopération économique pour compenser l'impact de la pandémie du covid-19. Tous deux ont soutenu un plan de relance à l'échelle de l'UE tandis que Berlin vient d'annoncer une importante relance budgétaire.
Dans un premier temps, 22 entreprises françaises et allemandes mettront en place une fondation à but non lucratif pour gérer Gaia-X, qui n'est pas conçu comme un rival direct des fournisseurs de cloud américain, mais arbitrerait plutôt un ensemble commun de règles européennes. « Construire une alternative basée en Europe n'est possible que si nous jouons collectivement », a déclaré Michel Paulin, directeur général d'OVHcloud, un fournisseur indépendant de services cloud français. Un concept important sur lequel repose Gaia-X est la « réversibilité », un principe qui permettrait aux utilisateurs de changer facilement de fournisseur. Les premiers services devraient être proposés en 2021.
« Fonctionnellement, ce sera une place de marché, où il y aura un catalogue d'offres de services peuplés par différents fournisseurs qui s'engagent à respecter certains principes », explique-t-on à Bercy. Les acteurs non européens ne seront pas exclus de la place de marché de Gaia-X, mais ils devront respecter les règles et garanties qu'elle impose, a-t-on expliqué de même source. C'est déjà beaucoup trop tard, selon les analystes de Gartner, qui prévoient que le marché mondial des services de cloud public augmentera de 17 % pour atteindre 228 milliards de dollars cette année. « Les principaux fournisseurs de cloud ont déjà agi rapidement pour développer ce marché », a déclaré Rene Buest, analyste chez Gartner.
« Le projet Gaia-X adopte la bonne approche pour monétiser les données dans l'ère émergente de la numérisation décentralisée, tout en s'assurant que chaque participant reste maître de ses données », déclare Xavier Poisson. « De nombreuses autres initiatives dans le monde vont dans le même sens, y compris des projets au sein de HPE. Depuis 2015, Hewlett-Packard Enterprise, à travers l'initiative Cloud28+, a offert au marché européen un catalogue de services de cloud computing pour accélérer le business et l'acquisition de connaissances liées au cloud tout en connectant les fournisseurs de services nationaux locaux aux utilisateurs finaux », souligne Nicolas Duffour, sous-directeur Méthodes et Services de plateforme au Ministère français de la Transition écologique et solidaire.
Source : Reuters
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Le , par Bill Fassinou
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