Google a licencié 28 employés pour avoir protesté contre le projet Nimbus avec Israël. Selon l'un des employés licenciés, la réponse de Google est disproportionnée et constitue la preuve que l'entreprise est prête à prendre les mesures de représailles les plus strictes contre les travailleurs qui tentent de faire entendre leurs voix. Il accuse Google d'être non seulement complice d'un prétendu "génocide" à Gaza, mais aussi d'entretenir un environnement interne "fasciste". Il invite les autres employés du secteur technologique à dénoncer les entreprises qui travaillent avec Israël et à ne pas avoir peur des représailles. Son avis ne fait toutefois pas l'unanimité.Hasan Ibraheem, un jeune homme de 23 ans, né en Syrie et élevé en Virginie occidentale, fait partie des 28 employés contestataires licenciés par Google la semaine dernière. Pour cause, ils ont pris d'assaut les bureaux de l'entreprise à New York et à Sunnyvale, en Californie, avant d'organiser un sit-in de protestation qui a été retransmis en direct sur différentes plateformes, dont X. Ils protestaient contre le projet Nimbus, un contrat de 1,2 milliard de dollars dans le cadre duquel Google et Amazon s'engagent à fournir des services cloud et d'IA au gouvernement et à l'armée israéliens. L'accord a été conclu en 2021.
Le contrat d'Ibraheem chez Google représentait son tout premier emploi à la sortie de l'université. Dans une interview accordée à Marisa Kabas, du site The Handbasket, Ibraheem a est revenu sur le déroulement des événements qui ont conduit à son arrestation, puis à son licenciement. Lors de l'interview, il a défendu l'action menée par son équipe afin de faire entendre leurs voix. Il a également accusé Google d'avoir usé d'un stratagème pour les faire arrêter pour "intrusion dans une propriété privée" avant de les licencier pour "perturbation du lieu de travail et mise en danger des collègues". Voici ce qu'il dit à ce sujet :

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Hasan Ibraheem
Quelques heures avant notre arrestation, ils nous avaient mis - les gens qui étaient assis - en congé administratif pour pouvoir confisquer nos badges. Parce qu'une fois que vous êtes mis en congé administratif, vous n'avez plus accès à vos appareils professionnels. Vous n'avez plus accès au bâtiment et ils vous confisquent vos badges.
Ce n'est donc qu'à ce moment-là qu'ils ont pu nous accuser d'intrusion. Car avant cela, nous étions des employés de Google avec des badges actifs qui avaient tout à fait le droit d'être sur ce lieu de travail. Il a fallu qu'ils nous mettent en congé administratif pour que les policiers viennent.
On aurait dit qu'ils étaient vraiment, tout le temps, en train d'essayer de comprendre ce qu'il fallait faire. Je ne pense pas qu'il y ait eu des gens qui aient jamais fait cela - des employés de Google refusant de partir en signe de protestation. Ils se sont donc efforcés de trouver la marche à suivre pour nous faire partir.
Selon les déclarations d'Ibraheem, certaines des 28 personnes licenciées n'étaient pas impliquées dans les mouvements de protestation. À ses yeux, il ne s'agit donc que de représailles, et d'un mécanisme de dissuasion. « Oui, il s'agissait de représailles, sans aucun discernement - des gens qui venaient juste de passer pour nous dire bonjour et peut-être nous parler un peu. Ils ont été renvoyés. Des gens qui ne sont pas du tout affiliés à No Tech For Apartheid, qui sont juste venus et qui s'intéressaient à ce qui se passait. La sécurité a demandé à voir leur badge et ils ont fait partie des 28 personnes licenciées », a-t-il déclaré.
Dans un mémo interne, Chris Rackow, responsable de la sécurité mondiale chez Google, a écrit : « si vous êtes l'un des rares à être tenté de penser que nous allons négliger les comportements qui violent nos politiques, détrompez-vous ». Commentant ce passage, Ibraheem a déclaré qu'il s'agit d'une menace à peine voilée. « C'est sans aucun doute une menace. Ils disent simplement : "hé, n'osez même pas penser que vous pouvez faire ce que ces gens ont fait" ». Ibraheem a déclaré lors de l'interview que d'autres employés de Google lui ont confié avoir trouvé le courriel de Rackow menaçant. Notamment, Ibraheem a déclaré :

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Hasan Ibraheem
Nous avons reçu des réponses de gens qui disaient qu'il semblait menaçant. Que cela semblait un peu exagéré en réponse aux employés de Google qui s'asseyaient, dans leur espace de travail, pacifiquement, et qui disaient : "hey, laissez tomber le projet Nimbus ou venez nous en parler. Ayez une sorte de conversation avec nous".
Google a réagi de manière totalement excessive, non seulement en licenciant toutes les personnes impliquées ou non, mais aussi en menaçant toutes les autres personnes de l'entreprise qui oseraient s'opposer à ce projet. Et les gens remarquent que cela ressemble à un environnement très fasciste.
Je pense que Google a vraiment peur que ses employés s'opposent à ce projet. Nous savons que nous [No Tech For Apartheid] sommes une organisation dirigée par des travailleurs, même s'ils ont souvent essayé de nous dépeindre comme un groupe externe qui ne représente pas les employés.
Mais non, nous sommes des employés de Google. C'est pourquoi nous avons tous été licenciés. Et Google comprend le pouvoir que nous avons, et ils ont peur que si nous sommes plus nombreux à nous exprimer, ils soient obligés de faire quelque chose.
Google a réagi de façon très ferme face aux récentes protestations contre le projet controversé Nimbus. Selon les critiques du projet, les capacités d'IA fournies par Amazon et Google à l'armée israélienne pourraient être utilisées dans des armes autonomes pour cibler les Palestiniens en Cisjordanie occupée ou à Gaza. Des employés des deux entreprises on écrit dans une lettre ouverte en 2021 : « la technologie que nos entreprises se sont engagées à construire rendra la discrimination et le déplacement systématiques effectués par l'armée et le gouvernement israéliens encore plus cruels et mortels pour les Palestiniens ».
Le projet Nimbus est perçu comme un soutien à l'armée israélienne, qui est actuellement engagée dans un conflit controversé contre le Hamas dans l'enclave palestinienne de Gaza. Même les estimations les plus prudentes font état d'au moins 30 000 morts dans la guerre actuelle entre Israël et le Hamas, et de nombreuses personnes (y compris de nombreux Israéliens) critiquent la réticence d'Israël à mettre fin à son offensive. Pour en revenir à Google, le projet Nimbus lui-même remonte au moins à 2021. Il est controversé depuis lors et de nombreux critiques affirment avoir subi des représailles ou poussé vers la sortie.
Certains travailleurs ne partagent toutefois pas l'avis d'Ibraheem et critiquent l'action du groupe. « Je blâme Google pour avoir favorisé un environnement dans lequel ces employés pensaient sincèrement qu'ils pouvaient passer leur temps de travail à défendre des causes sociales et à organiser des manifestations tout en conservant leur emploi et en encaissant leur salaire. Google n'est pas "fasciste" pour vous avoir licencié parce que vous vous êtes barricadé dans le bureau du directeur technique, que vous avez intimidé et menacé vos collègues et que vous avez diffusé toute cette mascarade en direct », a écrit un critique.
Il a ajouté : « votre travail en entreprise n'est pas une démocratie. Si l'entreprise continue à faire le ménage et revient à sa mission, il y a peut-être encore de l'espoir pour elle ». Le coup de projecteur de mardi est encore moins flatteur pour Google que les récentes débâcles de son modèle d'IA Gemini.
Source : Marisa Kabas, The Handbasket
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