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« Un million d'appels par heure » : quand l'infrastructure Azure devient la colonne vertébrale du système de surveillance militaire israélien
Une enquête évoque une « capacité de stockage quasi illimitée »

Le , par Stéphane le calme

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« Un million d’appels par heure » : quand l’infrastructure Azure devient la colonne vertébrale du système de surveillance militaire israélien,
une enquête note que le programme disposerait d'une « capacité de stockage quasi illimitée »

Une enquête du Guardian, menée avec le média palestinien +972 et le site hébreu Local Call, révèle que l’armée israélienne a mis en place un système de surveillance de masse d'une portée sans précédent qui s'appuie sur Microsoft Azure. Selon les documents internes et les témoignages recueillis, l’unité 8200 du renseignement israélien a obtenu de Satya Nadella un espace dédié sécurisé dans le cloud d’Azure. Le programme, opérationnel depuis 2022, dispose d'une infrastructure avec une « capacité de stockage quasi illimitée » qui permet d'archiver quotidiennement des millions d’appels téléphoniques passés par les Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie, y compris ceux passés vers des numéros internationaux et israéliens. Le volume est tel que les officiers ont forgé un mantra pour le décrire : « un million d’appels par heure ».

Ces enregistrements sont généralement conservés dans le cloud pendant environ un mois, bien que la période de stockage puisse être étendue si nécessaire. Au total, environ 11 500 téraoctets de données (soit près de 200 millions d’heures d’audio) seraient entreposés sur les serveurs européens de Microsoft (principalement aux Pays-Bas et en Irlande).

La mise en œuvre d'un tel système à cette échelle représente une évolution significative dans les capacités de surveillance étatique, soulevant des interrogations profondes sur la nature de la surveillance dans les territoires occupés.


Grâce à la capacité de stockage quasi illimitée d'Azure, l'unité 8200 a commencé à mettre au point un nouvel outil de surveillance de masse puissant : un système intrusif et exhaustif qui collecte et stocke les enregistrements de millions d'appels téléphoniques passés chaque jour par les Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie. Révélé dans le cadre d'une enquête menée par le Guardian en collaboration avec la publication israélo-palestinienne +972 Magazine et le média en langue hébraïque Local Call, ce système basé sur le cloud, qui est devenu opérationnel en 2022, permet à l'Unité 8200 de stocker quotidiennement une quantité gigantesque d'appels pendant de longues périodes.

Microsoft affirme que Satya Nadella, son PDG, n'était pas au courant du type de données que l'unité 8200 prévoyait de stocker dans Azure. Mais une série de documents Microsoft divulgués et des entretiens avec 11 sources issues de l'entreprise et des services de renseignement militaires israéliens révèlent comment Azure a été utilisé par l'unité 8200 pour stocker ces archives exhaustives des communications quotidiennes des Palestiniens.

Selon trois sources de l'unité 8200, la plateforme de stockage cloud a facilité la préparation de frappes aériennes meurtrières et a façonné les opérations militaires à Gaza et en Cisjordanie.

Grâce au contrôle qu'il exerce sur les infrastructures de télécommunications palestiniennes, Israël intercepte depuis longtemps les appels téléphoniques dans les territoires occupés. Mais le nouveau système, qui fonctionne sans discernement, permet aux agents de renseignement de réécouter le contenu des appels cellulaires passés par les Palestiniens, capturant ainsi les conversations d'un nombre beaucoup plus important de civils ordinaires

Azure et traitement des données vocales

D’un point de vue technique, cette opération repose sur les services cloud d’Azure, réputés pour leur haute capacité de stockage et de calcul. Unit 8200 a travaillé avec des ingénieurs de Microsoft pour bâtir un « outil révolutionnaire » de traitement des communications : les enregistrements audio des appels interceptés sont transférés dans un environnement virtuel sécurisé et surveillé. Les documents fuités indiquent que l’armée prévoit de migrer jusqu’à 70 % de ses données (confidentielles et top-secrètes) vers Azure, défiant les usages classiques de stockage hors du cloud.

Grâce à cette plateforme, les analystes peuvent retrouver rétroactivement les conversations de n’importe quel individu devenu « intéressant », alors qu’auparavant il fallait sélectionner les cibles avant l’interception. De plus, le système est complété par des outils d’intelligence artificielle : outre le stockage, il dispose de fonctions d’analyse automatique. Par exemple, un programme surnommé « noisy message » scanne massivement les textos palestiniens pour y repérer des mots « soupçonneux » (armes, désirs de mort…). Selon les sources, des outils d’IA plus poussés permettraient d’extraire des profils de risque ou de générer des recommandations de ciblage à partir des données vocales.

Dans ce système, les appels – qu’ils soient vers Israël ou à l’international – sont conservés environ un mois dans le cloud, avec possibilité d’extension pour les conversations jugées sensibles. L’infrastructure d’Azure assure que l’énorme afflux de voix peut être traité « dernière génération », en agrégeant stockage et puissance de calcul. C’est le « nuage infini » vanté par un officier de 8200, qui permettrait de garder en mémoire des conversations de masse sans jamais manquer de place. Pour l’armée, c’est le moyen de passer d’une surveillance ciblée à une écoute globale de toute la population palestinienne, ouvrant un nouveau champ aux opérations de contre-terrorisme (ciblage, arrestations, interrogatoires).

« Un million d'appels par heure »

Des sources bien informées sur le projet ont déclaré que les dirigeants de l'unité 8200 se sont tournés vers Microsoft après avoir conclu que les serveurs militaires ne disposaient pas d'un espace de stockage ni d'une puissance de calcul suffisants pour supporter le poids des appels téléphoniques de toute une population. Plusieurs agents de renseignement de l'unité, dont les capacités de surveillance sont comparables à celles de l'Agence nationale de sécurité américaine (NSA), ont déclaré qu'un slogan avait émergé en interne pour résumer l'ampleur et l'ambition du projet : « Un million d'appels par heure ».

Le système a été conçu pour être hébergé sur les serveurs de Microsoft, derrière des couches de sécurité renforcées développées par les ingénieurs de l'entreprise sur les instructions de l'unité 8200. Les fichiers Microsoft divulgués suggèrent qu'une grande partie des données sensibles de l'unité se trouvent désormais dans les centres de données de la société aux Pays-Bas et en Irlande.

Les révélations sur le rôle de la plateforme Azure de Microsoft dans le projet de surveillance interviennent alors que le géant technologique américain fait face à la pression de ses employés et investisseurs concernant ses liens avec l'armée israélienne et le rôle que sa technologie a joué dans l'offensive de 22 mois à Gaza.


Enjeux et controverses

Ce projet soulève immédiatement de vives questions de respect de la vie privée. La collecte et l’analyse de millions d’appels de civils entraînent un suivi permanent de la population palestinienne : « Quand ils n’ont pas de raison suffisante pour arrêter quelqu’un, ils la trouvent grâce aux informations stockées dans le cloud », rapporte une source militaire. Des défenseurs des droits humains dénoncent un système qui « traque tout le monde, tout le temps », assimilable à une surveillance généralisée illégale. L’accent mis sur le « tracking de chaque individu » et sur l’usage d’algorithmes pour évaluer les « risques » des citoyens crée un climat de méfiance et de violence constante, notamment en Cisjordanie où trois millions de Palestiniens vivent sous occupation.

Plusieurs ONG et experts en numérique font part de leurs inquiétudes. Un rapport de +972 Magazine souligne que le recours aux technologies cloud et IA de géants privés dans un contexte de guerre « énergise les capacités militaires d’Israël » au détriment des droits civils. Les organisations de défense des droits humains ont alerté sur les implications possibles de « cette gestion massive des données personnelles », qui s’inscrit dans un conflit aux condamnations internationales (mandats d’arrêt de la CPI en cours).

Par ailleurs, du côté des employés de Microsoft, la révélation a déclenché de vives réactions : plusieurs ingénieurs ont protesté publiquement (« No Azure for Apartheid »), un employé a interrompu fin mai 2025 une conférence de Nadella en criant « montrez comment Microsoft tue des Palestiniens ». Des actionnaires (60 investisseurs détenant 80 millions de dollars d’actions) ont également interpellé la direction en juillet 2025, exigeant davantage de contrôle sur l’usage des outils d’IA, accusant l’entreprise de « complicité potentielle de génocide ». Ces tensions internes témoignent de l’inquiétude croissante face au rôle des entreprises technologiques dans les conflits.


Microsoft: réactions officielles et contexte d’investissement en Israël

Face à ces révélations, Microsoft adopte un double discours. Officiellement, la société dément toute complicité consciente dans la surveillance de civils palestiniens. Dans un communiqué et sur son blog, Microsoft affirme n’avoir « aucune preuve à ce jour » que ses technologies Azure ou IA aient servi à cibler ou faire du mal à des populations civiles lors du conflit à Gaza.

L’entreprise rappelle que sa collaboration avec le ministère israélien de la Défense relève d’un contrat commercial classique (« logiciels, services, cloud et IA, y compris traduction automatique »), soumis à ses règles d’usage (Acceptable Use Policy) qui interdisent explicitement toute application « infligeant du tort ». Microsoft souligne par ailleurs qu’elle ne dispose pas de visibilité sur l’utilisation que font ses clients en interne de ses outils, et que pour les besoins militaires sensibles, les armées « utilisent généralement leurs propres logiciels propriétaires ». Le géant insiste qu’il n’a « créé ni fourni d’applications de surveillance ou de combat » aux forces armées, et que son aide a été, le cas échéant, très limitée (par exemple, un soutien d’urgence après les attentats du 7 octobre 2023 pour aider au sauvetage d’otages).

Dans les faits, Microsoft se retrouve prise entre ses promesses et les faits décrits par l’enquête. D’un côté, la firme affirme que Satya Nadella « n’a pas été informé du type exact de données » lors de la réunion de 2021, et que sa participation a été brève. Mais selon les documents internes, Nadella aurait approuvé l’objectif de migrer une part considérable des données de Unit 8200 vers Azure, qualifiant le partenariat de « critique » pour Microsoft. De l’autre, la direction fait valoir son engagement pro-Israël : Microsoft dispose de laboratoires de R&D et d’un campus de plusieurs milliers d’employés dans le pays, a inauguré fin 2020 son premier datacenter local en Israël (pour desservir Azure et Office 365), et a abondé un fonds d’investissement pour les start-up israéliennes. Autant d’engagements stratégiques qui montrent qu’Israël fait partie des « marchés clés » pour la firme américaine.

Dans ce contexte, Microsoft cherche à préserver son image de « confiance et neutralité », en rappelant publiquement son attachement aux principes de droits humains dans toutes ses opérations

Risques pour l’image des entreprises technologiques

Ce dossier illustre le dilemme auquel font face les géants du numérique impliqués dans des opérations militaires. D’un côté, les contrats gouvernementaux (dans ce cas, avec l’armée israélienne) représentent des milliards de dollars de revenus et l’accès à de nouveaux marchés. De l’autre, une telle collaboration expose les entreprises à d’énormes risques d’image et de réputation. Les critiques peuvent aller de la perte de confiance des utilisateurs à des campagnes de boycott (comme le slogan « No Azure for Apartheid » entendu récemment) et des pressions croissantes des investisseurs ou régulateurs.

Déjà mis en cause pour d’autres technologies de surveillance (reconnaissance faciale, drones, caméras...), Microsoft, tout comme ses homologues Amazon ou Google, voit sa neutralité perçue sérieusement ébranlée dans ce type de contexte. Aux États-Unis, certains législateurs et organisations appellent désormais à davantage de contrôles sur les exportations de technologies de surveillance et à la responsabilité des entreprises quant à l’usage final de leurs services.

Sources : The Guardian, +972, Local Call

Et vous ?

Cette enquête vous semble-t-elle crédible ou pertinente ?

Les fournisseurs cloud devraient-ils imposer un audit des usages réels de leurs services par les clients gouvernementaux ?

Peut-on encore considérer l’infrastructure cloud comme « neutre » quand elle est utilisée dans des contextes de guerre ou d’occupation ?

Jusqu’où un fournisseur doit-il être techniquement et juridiquement responsable de ce que ses clients font avec ses services ?

La surveillance massive de populations civiles peut-elle être justifiée par des raisons de sécurité nationale ?

Les géants du numérique doivent-ils pouvoir refuser explicitement certains contrats militaires ou étatiques ? Faut-il imposer une régulation internationale pour encadrer l’usage des services cloud et IA dans les conflits armés ?
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